samedi 22 septembre 2007

Tirer avantage de l'occasion

Dans une communication prononcée à San Francisco devant les membres de l’Organization of American Historians au printemps 2005, je me questionnais sur la tendance à étudier le passé états-unien par rapport à celui de son pays ou de sa région. Répandue chez les américanistes étrangers, cette tendance prend chez nous la forme d’études sur l’émigration des Canadiens français. Je n’ai pas l’intention de faire la liste des sujets d’histoire que mes collègues italiens, français, polonais, chiliens, japonais ou autres ont choisis dans leurs travaux d’histoire sur les États-Unis. Mais pourquoi s'intéresse-t-on à l’histoire de l’Autre par la perspective (directe ou indirecte) qu’offre la sienne ? Que révèle cette tendance sur les chercheurs, vus comme individus ou une collectivité, et sur les défis objectifs de la recherche en histoire aux États-Unis – celle fondée sur les sources, évidemment ? J’ai trop de chats à fouetter présentement pour tenter de répondre à ces questions complexes. Je reviendrai sans doute sur le sujet un de ces jours.

Pour l’instant, je rappelle que mes intérêts de recherche ne rejoignent pas ceux de mes confrères qui donnent à leurs travaux une double identité nationale - sauf si vous réussissez à établir un lien entre ce que je fais en histoire des États-Unis et ce que Pierre Vallières écrivait sur les Nègres blancs d’Amérique. Comme l’émigration des Canadiens français que le clergé d’antan dénonçait (lorsqu’elle menaçait, de l’avis de ses porte-parole, la survie d’une foi et d’une langue) ou appuyait (lorsqu’elle contribuait à la diffusion d’une culture et de ses valeurs), l’orientation que j’ai donnée à l’histoire des États-Unis devrait-elle être dénoncée ou promue ? La question est très mal formulée, je l’avoue, puisque la dénonciation des problématiques de recherche n’est pas une activité populaire chez mes pairs. À l’inverse, comment devrait-on promouvoir une orientation de recherche qui exige énormément (en temps et en argent) de l’historien ? En cette fin de semaine qui a vu le dollar canadien atteindre la parité avec le dollar américain, je réalise qu’il y a de l’espoir et qu’il nous faut profiter de cette conjoncture pour mousser davantage la recherche historique aux États-Unis… en rappelant aux étudiants intéressés les temps difficiles que nous avons connus (snif! snif!) lorsque le dollar canadien transigeait à soixante-cinq cents chez nos voisins du sud.